Expo du 15/11/19 au 4/10/2020

Vingt-cinq ans après la dernière exposition qui lui était consacrée, le Jeu de Paume – Château de Tours présente cet automne une rétrospective consacrée à René-Jacques. Étudiant en droit, ce qui le prédestinait à une tout autre carrière, il fait très rapidement le choix de suivre la voie artistique et d’adopter définitivement son nom d’artiste, afin de s’adonner à sa passion : la photographie.

« L’élégance des formes » dévoile une sélection de cent vingt tirages originaux, dont certains montrés pour la première fois, à travers un parcours rythmé par huit sections chrono-thématiques qui retracent les thèmes emblématiques de l’oeuvre de ce photographe qui demande a être redécouvert.

Figure marquante de la photographie française d’après guerre, René-Jacques (né René Giton, 1908-2003) débute sa carrière dans les années 1930. Très rapidement, il embrasse les mille métiers de la photographie, se faisant tour à tour reporter pour L’Intransigeant, illustrateur pour les éditions Grasset ou photographe industriel pour la régie Renault. Arpenteur des rues d’un Paris vide, sur les traces de Francis Carco et Léon-Paul Fargue, il est aussi photographe de plateau pour René Lucot, Wilhelm Pabst et Jean Grémillon. Conscient de la difficulté des photographes à faire valoir leurs droits et reconnaître leur art, René-Jacques, comme François Kollar, son aîné, ou Jean Dieuzaide, son cadet, participe aux différents groupes qui animent la photographie française : Le Rectangle, sous l’égide d’Emmanuel Sougez ; le Groupe des XV, à partir de 1946, où il retrouve Daniel Masclet, Willy Ronis, Robert Doisneau et son ami Marcel Bovis. Défendant ses images et ses points de vue, il participe aux nombreuses expositions que ces groupes organisent. Président pour les photographes du conseil d’administration de la Spadem (Société de la propriété artistique des dessins et modèles) à partir 1946, il prend également la tête du syndicat de la photographie publicitaire en 1961 et représente les photographes à la Commission nationale des sites.

Dans les photographies de René-Jacques, rien n’est anodin : chaque image est pensée et trouve sa source dans ses expériences préalables. Ainsi, quand il propose des illustrations pour des oeuvres de Carco et de Montherlant, il traduit en images les ambiances et les formes évoquées par les textes. De même, le jeu des ombres et des reflets sur les matières, qu’il affectionne dans ses natures mortes industrielles, fait suite à ses premières recherches et à son expérience de l’éclairage sur les plateaux de cinéma. Pour René-Jacques, professionnel exigeant, répondre aux demandes de ses commanditaires suppose de proposer, au-delà d’une image techniquement parfaite, un supplément d’âme et une vision renouvelée du paysage, du monument ou de l’objet industriel.

En 1991, conscient de la richesse de son travail photographique, il fait don à l’État de son oeuvre. Aujourd’hui conservée à la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine (MAP), la donation René- Jacques regroupe ses négatifs, un ensemble de plus de 20 000 tirages, ainsi que de très riches archives formées de ses publications, de sa correspondance professionnelle et des planches de tirages de lecture qui servaient à la diffusion de ses images.

René-Jacques

Né en 1908 à Phnom Penh, où son père est administrateur colonial, René Giton découvre la France en 1917, quand ses parents s’installent à Royan (Charente-Maritime). Poursuivant ses études au lycée Buffon à Paris, il emprunte à son père son premier appareil et découvre les possibilités de la photographie.
Bien qu’il soutienne ne lire aucune revue spécialisée à cette époque, ses premières images sont intimement liées aux avant-gardes photographiques des années 1920 et ébauchent les lignes directrices de sa future carrière. Sensible à l’étrangeté que peuvent créer les ombres, il refuse cependant tout artifice et ne pratique ni surimpression ni solarisation.
En 1931, il fait l’acquisition d’un Leica et publie ses premières photographies.
L’année suivante, il s’essaie au reportage pour le journal L’Intransigeant et commence à photographier Paris. C’est à cette époque qu’il commence à signer ses images sous le pseudonyme de René-Jacques. Photographe « polygraphe », selon le mot de Willy Ronis, l’un de ses contemporains, il répond aux commandes des revues et des éditeurs, devient photographe de plateau sur des films de Pierre Weil et propose des images pour des
publicités.

De son adolescence passée à Royan, René-Jacques garde une fascination pour la mer. Dans ses premières images, son oeil s’arrête sur les ombres des baigneurs, sur le sable des plages et la lumière du soleil couchant se reflétant sur les vagues.
En 1939, le réalisateur Jean Grémillon fait appel à lui comme photographe de plateau sur le tournage de Remorques. Le film met en scène l’histoire d’amour entre un pilote de remorqueur (Jean Gabin) et l’épouse du capitaine d’un cargo naufragé (Michèle Morgan). René-Jacques exige pleine liberté dans ses choix de cadrages et de sujets ; il veut pouvoir photographier les à-côtés du tournage et faire aussi des images pour lui. Grémillon accède à ses demandes et le photographe se rend sur le tournage à Brest, où, pendant trois semaines, il réalise près de 250 photographies sortant du cadre défini par le chef-opérateur. Les portraits des deux vedettes passent au second plan, ce qui irrite Jean Gabin : plutôt que de se voir exclu, René-Jacques préfère démissionner.
En 1948, il illustre de 65 photographies le texte d’Édouard Peisson, La mer est un pays secret, publié par les éditions Grasset. Celles-ci sont une compilation d’images prises dans les années 1930, notamment sur le tournage de Remorques en 1939.

Vernissage du 14 novembre 2019

L’inauguration de l’exposition René-Jacques « L’élégance des formes »